Bien Public Global

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Définition

On peut proposer trois définitions basiques : le bien commun, c'est ce qui appartient à tout le monde (ou à personne) au présent et au futur. Le bien public, c'est ce à quoi tout le monde doit avoir droit, ici et maintenant. Le service public, c'est la manière dont doivent être gérés, produits et distribués ces biens communs et publics. Et ceci, à toutes les échelles, du village à la planète.

Discussion

Par François Lille (Biens publics à l'échelle mondiale). Article paru dans la revue Altermondes, n°8, dec. 2006 – fev. 2007, Dossier « Le Sud a-t-il réellement besoin de l'aide du Nord ? »


"La théorie économique n'est pas le cadre pertinent pour déterminer ce que doivent être les biens publics. C'est pourquoi l'association BPEM en a proposé la définition suivante : "Les biens publics mondiaux sont des choses auxquelles les gens et les peuples ont droit, produites et réparties dans les conditions d'équité et de liberté qui sont la définition même du service public, quels que soient les statuts des entreprises qui assurent cette mission. Les droits universels humains et écologiques en sont la règle, les institutions internationales légitimes le garant, la démocratie l'exigence permanente, et le mouvement social la source".

Partant de là, quels biens publics mondiaux revendiquer, et quels sont ceux déjà en voie de reconnaissance ? La liste, ou mieux la typologie, en reste à faire sachant qu'un bien n'est pas public ni commun en soi. C'est un choix de société, plus ou moins ancien, plus ou moins stable. S'il n'y a pas de biens publics "par nature", il en existe de toutes natures : l'eau, l'énergie, la santé, l'éducation, la justice, la paix, l'alimentation, la biodiversité, les télécommunications voire même la monnaie.

L'édifice des droits

L'idée de biens communs de l'humanité impose de ne pas sacrifier le futur pour alimenter le présent (surtout lorsque ce qu'on alimente est le profit). L'idée de biens publics mondiaux ajoute judicieusement que l'on ne préservera pas non plus le futur en sacrifiant le présent, sauf sacrifices nécessaires librement consentis et équitablement répartis. Car la liberté du consentement dépend aussi de l'équité de la répartition. Et l'équité dit aussi que "qui casse les verres les paye". Autrement dit, pour prendre le cas exemplaire du climat, la puissance des nations qui l'ont déstabilisé doit être en priorité requise pour le restabiliser !

C'est à ce double prix que le concept élargi de développement durable pourrait prendre tout son sens. Mettre les biens publics au centre de tout projet de développement sera la meilleure garantie de la sauvegarde des biens communs de l'humanité. Mais la sauvegarde des biens et services publics locaux hérités de l'histoire des peuples, les efforts en vue d'en construire de nouveaux à l'échelle mondiale, se heurtent à la dynamique aveugle du capitalisme financier, appuyé sur les institutions ad hoc que se fabriquent les États dominants.

Que faire pour que le caractère social des biens communs et publics et de leur service dépasse les égoïsmes nationaux et échappe aux convoitises multinationales ? Pour qu'il cesse de couvrir le pillage éhonté des richesses de peuples dominés, qui récoltent en échange des nuisances meurtrières ? La réflexion sur les biens communs et publics mondiaux devient d'une urgente nécessité.

Le droit sur lequel on peut définir et poser l'exigence des biens communs et publics mondiaux est l'édifice croissant des droits universels, de la Déclaration universelle des droits humains de 1948 au foisonnement des conventions, en passant par les deux pactes généraux sur les droits civils et politiques d'une part, économiques sociaux et culturels de l'autre. Un édifice bien incomplet encore, peu appliqué surtout... Et le droit écologique reste pour l'essentiel à bâtir, pour laisser autre chose à nos descendants qu'un champ de ruines.

Ce droit mondial en formation et les institutions qui l'ont pour loi fondamentale, sont absolument nécessaires pour contrer le pouvoir des institutions de fait que se sont données les États dominants et les puissances financières.

Une prochaine étape essentielle pourrait être la reconnaissance d'un socle de biens publics mondiaux, nés du droit des peuples et des gens du monde à des choses essentielles ou fondamentales, ou tout simplement souhaitables. Mais autant la définition des biens communs et publics peut et doit être générale, autant la configuration concrète qui les fournira devra s'appuyer d'abord sur les services publics existants, ou à refonder localement, à toutes les échelles. Ce qui redonnera en retour, à toutes échelles aussi, des forces à ces services publics menacés.

Ni panacée, ni formule magique

Le passage de l'idée de l'aide à celle des biens publics, c'est celui de l'humiliante et trompeuse assistance aux droits des peuples et des gens. L'une se quémande, les autres se revendiquent et s'exigent. Ce qui implique que la première exigence mondiale est celle de la démocratie.

Qu'est-ce donc que la démocratie ? C'est un ensemble complexe de règles organisant le droit de tous à participer aux décisions, soit passivement en votant, soit activement dans des mouvements sociaux ou politiques où la voix de chaque personne vaut celle d'une autre, et où les connaissances de l'un vont à tous. Démocratie participative et représentative s'y confortent au lieu de s'opposer.

C'est à l'absolue nécessité d'une alternative pacifique mais radicale au projet ultralibéral que nous amène cette réflexion. Sans être la panacée, la formule magique qui guérira tous nos maux, les biens communs et publics mondiaux sont au cœur de ce projet.

Rêvons-nous ? Pas tellement, si l'on fait appel au souvenir et à la trace juridique de certaines luttes historiques contre des réalités "économiquement incontournables", l'esclavage au XIXème siècle, le colonialisme au XXème, d'autres auparavant. Il n'y a au monde d'autres fatalités humaines que celles auxquelles on se soumet. Pour nous, à tous les niveaux, le mouvement social est le fondement essentiel du progrès humain, et la démocratie sa condition première."